Le circuit des établissements qui présentent des spectacles de drags est de plus en plus contingenté. Le nombre d’artistes au sein de cette communauté ne cesse de proliférer, mais celui des lieux où exprimer leur art ne suit pas la cadence. Ainsi, il n’est plus rare de voir des drags provoquer les occasions en proposant leur propre concept là où on ne les attend pas forcément. C’est dans ce contexte qu’Aliss Love a lancé son spectacle mensuel Unholy Sunday au Ninkasi à Québec, que Mémé Caramel a fait de même avec ses spectacles Une jument, deux jockeys! au bar Le Jockey à Montréal et Talkshow au resto au Cabaret Majistick de St-Jérôme et que Nicole Kidcat complète le tour du chapeau avec une initiative similaire au Notre-Bœuf-de-Grâce, au cœur du Village, le Drag « N » Burgers Show. Elles ont toutes les trois accepté de discuter avec moi, à l’occasion d’une table ronde, afin d’expliciter leur motivation respective d’avoir entrepris de telles démarches.
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Malgré les défis occasionnés par l’ampleur de la tâche que toute cette implication représente, notamment pour tout l’aspect promotionnel, la motivation demeure au rendez-vous. Celle-ci est principalement alimentée par un désir de proposer des concepts qui leur ressemble et qui s’éloignent de l’offre dite plus « traditionnelle ». Comme le souligne Aliss, le fait d’avoir initié sa propre soirée au style singulier (étant plus trash), elle n’a pas à se compromettre. Elle se sent totalement libre dans sa créativité.
Chacune des trois a ses propres motivations. Après un parcours tumultueux à essayer de joindre l’un ou l’autre des concours de la relève, Nicole Kidcat a décidé de se proposer comme hôtesse auprès d’un restaurant du Village. C’est ainsi que, de fil en aiguille, Nicole a fini par approcher le gestionnaire afin de lui proposer d’offrir un spectacle dans le cadre de l’édition 2021 de Fierté Montréal. Le succès de ce souper-spectacle fut tel que la soirée est désormais offerte à tous les mois depuis ce jour. Ce concept s’inscrivait parfaitement dans volonté du propriétaire de faire de l’établissement un lieu festif. Dans cette optique, dès son ouverture, le restaurant était muni de l’équipement nécessaire pour ce genre d’événement.
De son côté, après avoir orchestré des spectacles de production ici et là dans la métropole québécoise, Mémé avait besoin de stabilité. C’est ainsi qu’elle a amorcé des démarches afin de trouver refuge. Elle avait entendu entre les branches que le bar Le Jockey cherchait à renouveler son offre avec un nouveau show. Son speech de vente s’articulait autour d’un concept de compétition humoristique dont le titre faisait écho au nom de l’établissement. L’offre n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd et ce fut le début d’une belle collaboration professionnelle entre les deux partis. Bien que la soirée soit axée sur l’humour, Mémé ne voulait pas se restreindre au seul rôle d’animatrice, ce serait d’aller à l’encontre de ses motivations, c’est pourquoi elle offre des performances en ouverture et en fermeture de spectacle. Il en va de même pour la soirée qu’elle mène au resto-cabaret Majistick.
Pour sa part, Aliss vit une réalité un peu plus particulière alors qu’il n’y a qu’un seul bar qui présente des spectacles de drags à Québec. Bien qu’elle ait eu l’occasion de performer au bar Le Cocktail lors de la soirée C’est juste lundi! – Place à la relève que mène Sally-D, faire continuellement des aller-retours Québec-Montréal n’était pas envisageable sur le long terme. Cette difficulté de percer lui aura finalement permis de mettre au monde une soirée unique, qui se distingue par son style marginal, offrant ainsi plus de diversité dans la gamme de choix qui s’offre au public.
Bref, ce qui unit nos trois protagonistes dans leur projet respectif, c’est surtout la volonté d’offrir des concepts qui leur ressemblent, de faire de la place à la relève pour qui les occasions de performer sont plus rarissimes et de jouir d’une liberté artistique. Ultimement, tant pour Aliss, Mémé que Nicole, le succès de leur initiative respective est d’avoir réussi à fidéliser une clientèle qui revient à chaque mois pour les voir. Pour chacune d’elles, le succès de leur soirée ne se dément pas. C’est beau de voir que de tels projets connaissent un si beau succès. Grâce à cela, nous avons la preuve qu’il ne faut pas craindre de foncer et de provoquer les choses. Ce n’est pas un secret, être travailleur autonome s’accompagne d’un lot de défis. Je salue l’initiative de ces trois artistes d’avoir oser et que leurs efforts aient mené à des résultats concluants. De plus, elles peuvent se targuer de promouvoir l’art du drag dans d’autres établissements que ceux auxquels on pourrait s’attendre.
À venir pour elles:



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